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InfoMigrants avait rencontré Jeanne d’Arc, en octobre 2018, à Tunis. Cette ancienne esclave ivoirienne a été bloquée dans le pays pendant six ans à cause de "pénalités financières". Elle va enfin pouvoir sortir du pays et rendre visite à ses enfants en Côte d’Ivoire. Pendant six longues années, elle sera restée en Tunisie.

Jeanne d’Arc, une ressortissante ivoirienne qui rêvait d’Europe, a été vendue par son passeur à une famille aisée de Tunisie, puis réduite à l’état d’esclave domestique. C'était en 2013. Quand elle réussit enfin à s’échapper de cet enfer, un an après, Jeanne d’Arc est incapable de continuer son chemin vers les côtes européennes. Elle sera coincée à Tunis, endettée jusqu’au cou à cause de sa situation administrative.

En Tunisie, selon la loi en vigueur, les étrangers en situation irrégulière doivent s’acquitter de "pénalités de dépassement de séjour", sorte de sanctions financières contre les sans-papiers. Plus un migrant reste en Tunisie, plus les pénalités s'accumulent. Ne pas payer ses pénalités, c'est ne pas pouvoir sortir du pays.

Jeanne d’Arc restera six ans sans aucun papiers, ses pénalités se comptaient en plusieurs milliers d’euros : 2.000 euros, précisément (5.900 dinars tunisiens). Une fortune pour Jeanne d’Arc.

"Je suis prisonnière dans un pays où je n’ai jamais eu envie de vivre", dit-elle. Mais elle ne s’est jamais résignée. "J’ai fini par me dire qu’il fallait que je fasse quelque chose en Tunisie, alors j’ai ouvert un petit salon de coiffure".

"Grâce à l'écho médiatique de mon histoire, j'ai eu la chance d'être reçue par la ministre"

Jeanne d'Arc passe ses journées entre la gestion de son salon et ses formalités administratives. "Sans aucune aide associative", elle se battra seule pendant des mois pour faire annuler ses pénalités. Au mois de mai 2019, c’est enfin la fin du calvaire. Jeanne d’Arc reçoit une lettre officielle, où l’État confirme l’annulation de ses pénalités. "C’est une longue bataille juridique que j’ai enfin gagnée", explique-t-elle. "Grâce à l’écho médiatique de mon histoire, j’ai eu la chance d’être reçue par la ministre des Solidarités en Tunisie et par l’Instance des Droits de l’Homme". En quelques mois, sa situation s’est donc débloquée.

"C’est une bonne nouvelle", estime-t-elle aujourd’hui, peinant encore à réaliser ce qu’il lui arrive. "Ce fut très difficile mais ma patience et mon courage ont fini par payer. Maintenant, je peux souffler un peu".

Jeanne d’Arc veut désormais obtenir des papiers en Tunisie. "Je suis contente de pouvoir sortir du pays si je le souhaite mais je veux faire ma vie ici", ajoute-t-elle en expliquant avoir entrepris des démarches pour obtenir une carte d’étudiant – et ainsi régulariser sa situation plus facilement. "Avoir le statut d’étudiant, c’est être en situation régulière. Je me suis inscrite dans une école de formation à la comptabilité". Jeanne d’Arc compte également garder le petit salon de coiffure qu’elle a ouvert dans un quartier de la capitale.

Retourner vivre en Côte d’Ivoire n’a jamais été une option – même si ses enfants sont toujours là-bas. "Je voulais annuler mes pénalités pour aller rendre visite à mes enfants", répète-t-elle. Elle espère réunir assez d’argent pour se payer un billet d’avion. "Il me faut environ 500 euros, cela fait des mois que j’économise".

Son fils et sa fille avaient respectivement 2 ans et 6 ans quand elle est partie. Ils ont maintenant 8 ans et 12 ans. "Je ne sais pas si mon fils se rappelle de mon visage", craint-elle. "Je suis angoissée. Je suis heureuse de pouvoir leur rendre visite mais en même temps, j’ai la peur au ventre".

 

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